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Jean-Pierre Bouchez - Le « management à la française » où la prégnance de la culture verticale

Il y a plus de trente ans, Philippe d’Iribarne publiait un ouvrage remarqué, dans lequel il soulignait l’influence des cultures nationales sur la gestion et le fonctionnement des organisations. La France serait ainsi caractérisée par la « logique de l’honneur » (titre de l’ouvrage). Dans cette perspective, « les rapports hiérarchiques mettent en relation des hommes marqués par leur état, leurs traditions, leurs droits et leurs devoirs ».

Cette manière française du « vivre ensemble » puise sa source dans les analyses de Montesquieu (L’Esprit des lois) et de Tocqueville (L’Ancien Régime et la Révolution) au regard d’une société divisée en ordres, marquée ainsi par la notion de l’honneur, les oppositions entre le noble et le vil, le pouvoir honoré et le pouvoir méprisé et craint.

TOUJOURS LE « SENS DE L’HONNEUR »

Dans un entretien accordé le 17 décembre 2016 au quotidien Le Monde, d’Iribarne persistait à considérer qu’aujourd’hui encore, c’est le sens de l’honneur qui gouverne en France, la manière dont les relations de travail sont ressenties. On peut certes nuancer ses analyses, mais on doit bien admettre que plus globalement – ainsi que nous l’avons nous-mêmes observé lors de nos entretiens de terrain – la prégnance, en dépit des discours et des récits fondés de la « libération » de l’entreprise..

Cette perception a été étayée par les célèbres travaux menés depuis les années 1980 sur la base d’une enquête conduite auprès des employés d’IBM dans le monde, portant notamment sur la distance hiérarchique (PDI ou Power Distance Index) permettant de comparer les cultures nationales. Cet indice définit le grade de la distance par rapport au pouvoir entre managers et subordonnés en se déployant de 0 à 100. Elle relève ainsi que la France, qui atteint un score de 68, apparaît comme une société très hiérarchisée, ainsi placée nettement devant les États-Unis (40), les Pays-Bas (38), la Grande-Bretagne et l’Allemagne (35), pays à faible distance hiérarchique.

Ces constats sont confirmés par l’institut européen Eurofound, via sa sixième « Enquête européenne sur les conditions de travail (EWCS) » réalisée en 2010 sur la base de 44 000 travailleurs interrogés, publiée en 2012. En moyenne, 40 % des salariés européens (28 pays) considèrent pouvoir influencer les décisions considérées comme importantes pour leur travail, contre 31% des salariés français.

Enfin, en se focalisant sur la France, on relèvera que, selon la dernière étude de la DARES en 2014, concernant les conditions de travail, les marges de manœuvre et donc l’autonomie tendent à se réduire pour l’ensemble des catégories professionnelles (à l’exception des ouvriers non qualifiés).

LA CONFIANCE TOUJOURS EN BERNE

Ces tendances doivent être corrélées avec la question centrale de la confiance, condition de toute forme de coopération et de collaboration, comme le soulignent notamment Algan, Cahuc et Zylberberg dans leur ouvrage intitulé La fabrique de la défiance 2012), où il apparait que la position de la France n’est guère enviable. Ils rappellent en particulier que parmi les 97 pays couverts par les enquêtes de World Values Survey, la France se positionne plutôt en queue de peloton au 58e rang de l’échelle de confiance. Au niveau de l’OCDE, la confiance est la plus faible avec le Portugal et la Turquie, alors que nous sommes très allégrement dépassés par les pays d’Europe du Nord (Norvège, Suède, Danemark), leur niveau de confiance apparaissant comme environ trois fois supérieur au nôtre. L’Espagne et l’Italie ayant un niveau supérieur à celui de la France (invalidant une lecture réductrice d’une segmentation nord/sud), de même que l’Allemagne, la Grande Bretagne et les Etats-Unis.

Ces différentes données laissent entrevoir une forme particulière de « management à la française », où l’Homo hierarchicus devra pourtant de plus en plus cohabiter notamment avec des populations de plus en plus nombreuses aux aspirations contradictoires centrées sur l’autonomie. Intenable durablement…